vendredi 26 septembre 2008

Salauds de pauvres

L’écologie est à la mode, c’est un sujet porteur, qui fait vendre et plus on vent plus on consomme et plus on consomme plus on concourt à la destruction de la planète: la consommation est mortifère. Ne pas le penser est dangereux et pour moi soyons clair les homos consominus sont plus dangereux que les pires des serials killers car ils ne menacent pas quelques individus mais la vie toute entière.

Et qui pollue le plus ? les pauvres !

On les a tous vu entassés à 7 dans leur vieille voiture qui pollue et qui passe le contrôle technique grâce au lien étroit qui existe entre le contrôleur et une boisson anisée bien connue. Le loueur de voitures Ucar a même lancé une campagne de pub sur le thème « Les pauvres sont déguelasses : ils polluent ».
On les a tous vu encombrer nos centres villes pour traîner devant des boutiques dans lesquelles on ne les laissera même pas entrer.
On les a tous vus dans ces supermarchés de bas étage où, après avoir pollué la planète, ils vont se polluer le corps avec des produits pas chers et douteux.
On les a tous vus se chauffer maladroitement avec de vieux poêles à charbon.

Changeons d’échelle et ne prenons plus les individus mais les états.

Lesquels polluent le plus ? Les pauvres.

Et c’est le Brésil qui détruit la forêt amazonienne, notre poumon à tous. Et c’est Chavez qui, après avoir nationalisé les compagnies pétrolières, vent le super 4 centimes d’€ le litre. Et c’est la Chine, dont les 4/5 sont très pauvres et qui pollue tant qu’elle peut.

Heureusement les riches sont là et les décideurs aussi. Ben oui ce sont les mêmes. Et que je te mets le super à 1.50 €. Et que je t’augmente le prix des autoroutes. Et que je vais te mettre des péages à l’entrée des grandes villes (12 £ pour rentrer dans Londres(sur ce dernier point on a réinventé l’eau tiède puisque ce dispositif s’appelait il y a quelques siècles l’octroi mais s’appliquait aux marchandises)). Et que je te prends des arrêtés anti-mendicité afin de supprimer la pollution visuelle.

Attention, ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit : il ne faut pas supprimer les pauvres sinon à qui les riches pomperont ils leur fric ? Non il faut simplement leur faire comprendre de gré ou de force, que c’est une sous-espèce devant donc vivre dans un sous monde en se nourrissant de sous- produits et tout çà loin de la vue des riches à qui ils gâchent les plaisirs !

En face des pauvres, les riches, seul ou à la rigueur à deux dans des voitures presque aussi longues que leur bateau, des voitures propres, qui ne fument pas, qui ne sentent pas le cramé mais le cuir, qui n’encombrent pas les rues et les parking de nos belles cités puisqu’ils ont des garages eux et qu’ils ne font pas du lèche-vitrine devant les épiceries fines puisqu’ils sont à l’intérieur.

La plupart des défenseurs de l’environnement sont favorables à la hausse du prix des carburants car, la preuve en a été faite, c’est la seule façon de diminuer la consommation. Cet argument a ceci de formidable qu’il a donné à nos décideurs et aux grandes compagnies une raison saine, honnête et écologiste de se remplir les poches : Total, qui traîne les pieds dans l’affaire de l’Erika, 12 milliard d’euros de bénéfice en 2007 ; Exxon, l’américain, 25 milliards de dollars de bénéfice la même année. Et l’on sait bien que la défense de l’environnement est leur cheval de bataille à ces grands groupes. Y a qu’à les voir se frotter les mains à l’idée que la fonte du pôle nord leur permettra de raccourcir la route de leurs bateaux de 9 000 km et de réaliser de substantielles économies.


Mais l’augmentation des prix des carburants touche d’abord et surtout les plus fauchés qui ont un besoin impératif de se déplacer pour aller au boulot ou en chercher. Vous avez bien sûr compris que je n’en veux nullement aux pauvres. Ce qui est le plus désespérant dans ce qui précède c’est que j’ai un peu grossi le trait mais tout ce que j’ai dit est vrai. Seule l’interprétation est fausse.

Alors reprenons donc depuis le début : les pauvres d’abord : est ce qu’ils polluent ? Non bien sûr car pour polluer il faut consommer et pour consommer il faut de l’argent et ils n’en ont pas. Ceux qui ne comprennent pas çà n’ont jamais été pauvre. Mon hôte a été pauvre : il portait les vêtements et les chaussures des autres, il ne savait pas ce qu’était l’argent de poche, ni la télé, ni les vacances ailleurs que dans son village, ni la voiture ni aucun des biens de consommation. Le confort matériel ne lui a pas manqué : c’était comme çà ! Mais aujourd’hui cela lui donne une indépendance de corps et d’esprit qu’il ne vendrait pas pour tout l’or du monde ! Regardons les plus pauvres de tous : les africains : ils ne jettent rien, ils récupèrent tout. La gestion des déchets ce sont les pauvres qui l’ont inventée !

Ai-je besoin de vous dire ce que je pense de ceux qui brûlent du kérosène ou du super par plaisir ? Non je ne crois pas. Les riches polluent pour les raisons inverses qui font que les pauvres ne polluent pas ou peu.

Changeons à nouveau d’échelle et replaçons-nous au niveau des états et qu’observons-nous? Que c’est la même chose. Les états industriels, USA en tête, sont les plus gros pollueurs et pour faire encore mieux ils achètent aux pays pauvres leurs quotas de droit à polluer ! C’est y pas formidable cette conscience collective. Et qui donne des exemples de cette conscience là. Les pays pauvres encore et toujours : l’Equateur par exemple qui vient d’annoncer qu’il renonçait à exploiter des réserves pétrolières car cette exploitation menacerait l’environnement du parc naturel Yasuni. C’est l’Inde qui remplace les pompes à fuel utilisées pour monter l’eau des puits par des pompes à pédales ; c’est la Rhodésie qui a modifié les méthodes de construction des maisons dans ses campagnes pour arrêter la déforestation et bien d’autres exemples encore.

L’on a invité mon hôte à aller aux Seychelles en février prochain au motif que dans trente ans ces îles seraient sous l’eau. A-t-on déjà entendu plus grosse connerie (pardon mais y a pas d’autre mot) Sous prétexte que cet archipel risque de disparaître on va se dépêcher d’y aller même si cela accélère sa disparition. : c’est ce qu’il a répondu et il est passé pour un empêcheur de voyager en rond. Prenons exemple sur la grotte de Lascaux découverte par quatre garnements en 1940 et que Malraux a interdit au public en 1963 pour la protéger et où l’on vient de trouver, malgré les mesures de protection draconiennes, qu’elle est encore menacée par des champignons. Et bien si l’on veut protéger les Seychelles, il faut faire comme avec Lascaux, ne pas y aller.


Salauds de pauvres, comme disait Gabin à Bourvil dans la traversée de Paris. C’est sûr que ça ne sanctifie pas la pauvreté mais ça donne quand même des circonstances atténuantes. Alors comme le sétois, quand je vois passer un voleur d’œuf, je le laisse partir surtout si celui qui me demande de l’arrêter est un voleur de bœuf !

2 commentaires:

gicerilla a dit…

Envie quand même de commenter que si l'écologie est un souci de riches, il serait bon que ceux qui n'ont pas les moyens aient au moins le bon sens de ne pas aggraver l'état de taudis des villes dans lesquelles ils vivent. Pour se respecter un peu plus, pour garder au coeur leur dignité que la pauvreté menace tous les jours. Je me souviens avoir visité Les Saintes. Quel gâchis de voir dans le bas côté, dans les bananeraies des detritus de toutes sortes, imputrécibles, qui resteront encore bien des années s'ils ne développent pas une sensibilité à leur environnement comme le reflet des gens qu'ils sont !

Hadès a dit…

Je me suis sûrement mal exprimé Gicerilla, puisque tu as mal compris. L'écologie est devenue un souci de riches parce qu'elle va permettre de gagner de l'argent c'est tout. En ce qui concerne les pauvres, vivre est un telle question de survie pour eux qu'on peut difficilement leur en vouloir de le faire salement...